Il faut garder en tête que les gènes viennent en deux copies, c’est-à-dire que notre système génétique est dupliqué (voir la page chez Labgenvet sur la Génétique du chien 1,0 : Concepts de base). De plus, l’effet d’une copie d’un gène peut être dominant (avec des effets évidents) par rapport à l’autre copie, ou récessif, avec des effets potentiellement cachés. Pour un gène donné, un individu peut avoir deux copies identiques (soit deux copies dominantes ou deux copies récessives), ou une copie dominante et une copie récessive. Par ailleurs, les fonctions d’un gène peuvent masquer ou peuvent être permissives aux fonctions d’autres gènes.
1. Gènes codant pour les couleurs de base
La couleur est donnée par des produits chimiques appelés pigments. Ces pigments sont produits par des cellules spécialisées nommées mélanocytes, que l’on retrouve dans le poil, la peau et les yeux. Chez le chien, la couleur et les patrons de pigmentation dans les poils sont les plus évidents.
Les deux pigments de base qui contribuent à la coloration des chiens sont les pigments noirs et jaunes. C’est l’interaction entre l’expression des gènes responsables de ces deux pigments qui donne au chien sa coloration de base. Il faut réaliser qu’un poil seul peut être complètement noir, complètement jaune ou encore jaune avec une bande noire à la pointe.
Il est à noter qu’un manque de pigment donne une «couleur» blanche. La génétique de la coloration de base chez le chien est compliquée à cause de deux aspects qu’on ne voit pas chez nos autres animaux domestiques. Premièrement, il y a deux façons d’avoir un chien noir : une à partir du Locus K avec une génétique dominante, et l’autre à partir du Locus A avec une génétique récessive. Deuxièmement, il y a deux façons d’avoir un chien jaune : une à partir du Locus A avec une génétique dominante, et l’autre à partir du Locus E avec une génétique récessive.
Locus K (noir dominant)
Le Locus K est unique aux chiens et n’est retrouvé chez aucun autre animal domestique, pas même le chat. Un Locus K dominant (KB) est responsable de la coloration Noire Dominante vue chez certains chiens tels que les Labrador Retriever. Une seconde variation du Locus K est responsable de la coloration bringée (Kbr) comme chez les Boxer. Finalement, un Locus K récessif (Ky) permet au gène Agouti d’être fonctionnel pour exprimer le pigment jaune.
Locus E (jaune récessif)
Le Locus E, aussi connu sous le nom d’Extension, affecte la production de la pigmentation noire. Lorsque les chiens sont doublement récessifs au Locus E (e/e) tout en étant dominants pour la coloration noire (KB) au locus K, ils obtiennent une coloration jaune puisque le pigment noir ne peut pas être exprimé : c’est le jaune récessif. Ceci est en contraste avec le jaune dominant observé avec le locus A (Agouti) et peut être source de confusion. La coloration jaune récessive est responsable de la majestueuse coloration dorée des Golden Retriever et de la coloration rouge royale des Setter Irlandais. Le Locus E possède également une version dominante (EM), résultant en un « Masque Noir », qui est un patron de coloration observé chez plusieurs races de chiens.
Locus A (Agouti ; jaune dominant et noir récessif)
Le gène Agouti, retrouvé au Locus A, est le maître pour la production du pigment jaune. Chez les chiens, l’Agouti est le gène responsable du Jaune Dominant (A/-) que l’on retrouve chez plusieurs races de chiens comme le Carlin et le Teckel, et du Noir Récessif (a/a) qui est observé chez le Border Collie, par exemple. L’Agouti donne aussi quelques autres patrons de couleurs : l’Agouti proprement dit (référant au patron de poils jaunes avec des pointes noires, comme chez les Bergers allemands) et le noir et feu (tan) observés chez plusieurs races de chiens comme les Setter Gordon (à mentionner puisque c’était notre premier chien de famille !), le Doberman et le Rottweiler. Pour que le gène Agouti soit fonctionnel et démontre une interaction entre les gènes, le chien doit posséder les deux copies récessives du Locus K (Ky/Ky).
Locus C (albinos)
Le Locus C est mentionné dans la section du chien par respect pour les chats. Le Locus C est le gène maître qui contrôle la formation de deux pigments : le noir et le jaune. Lorsque le gène est muté et inactif, aucun pigment n’est formé. Une mutation récessive du Locus C va donner un chien blanc récessif ou «albinos», mais ceci n’est pas quelque chose de désirable pour les éleveurs de chiens. Ainsi, le Locus C est de peu d’intérêt pour les éleveurs de chiens : ils ne se soucient généralement pas du fait que le Locus C donne le patron magnifique de « Colorpoint » chez les chats (voir la page chez Labgenvet sur la Génétique du chat Cat 2,0 : Les couleurs).
2. Gènes codant pour la modification de couleurs de base
Ces gènes ne forment pas de pigments de coloration, mais ils influencent la teinte de la couleur, habituellement en réduisant (diluant) l’intensité de celle-ci. Les gènes qui modifient la couleur comprennent le Brun (Locus B) et la Dilution (Locus D).
Locus B (Brun)
Le gène Brun (Locus B) chez les chiens, modifie l’intensité de la pigmentation noire. Le brun est un trait récessif qui permet d’alléger la pigmentation noire normale (B/-) pour donner une coloration brune (b/b). La coloration normale est dominante par rapport au brun qui est récessif. Le Locus B n’a pas d’effet sur la pigmentation jaune provenant du Locus A (Agouti).
Locus D (Dilution)
Le gène de Dilution (Locus D) est un autre gène qui modifie la coloration normale, en estompant ( diluant ) les pigments noir et jaune. Le Locus D est un trait récessif qui va modifier la pigmentation noire et qui va donner une coloration grise (d/d) appelée Bleue ou en d’autre termes : Grise, Ardoise, Buff etc., dépendamment de la race. Ce Locus peut se combiner au Locus B pour donner des couleurs de fourrures additionnelles, comme Isabella, Lilas (comme chez les chats), Fauve et Chamois, selon la race. Chez certaines races, le Locus D est associé avec l’alopécie (ou la perte de poils), qui est probablement dû à la combinaison du (d/d) avec d’autres gènes qui n’ont pas encore été identifiés.
3. Gènes codant pour les taches blanches
Les marques blanches sont une caractéristique importante dans la génétique de coloration chez les chiens. Fait intéressant, le blanc n’est pas une couleur en soi, mais plutôt un manque de couleur. En fait, la coloration blanche provient d’un problème vécu durant le développement, soit d’un manque de cellules (appelées mélanocytes) qui produisent la pigmentation. Le gène majeur codant pour des taches blanches se trouve sur le Locus S, et il est classé en 4 versions :
S – La version dominante donne un chien sans aucune tache blanche.
si– Les taches blanches Irlandaises donnent un chien avec des taches blanches sur le ventre.
sp– Les taches blanches Piebald donnent un chien avec des taches blanches aléatoires.
sw – Les taches blanches extrêmes donnent un chien presque entièrement blanc, habituellement avec quelques parcelles de pigmentation sur la tête.
Récemment, le gène impliqué dans le Locus S, ainsi que quatre mutations distinctes associées à des taches blanches ont été identifiés. Toutefois, la génétique des taches blanches demeure compliquée et non entièrement comprise. En effet, les différents patrons de taches blanches observés peuvent résulter de la combinaison de mutations qui ont été décrites précédemment, et peuvent varier entre les différentes races. Par ailleurs, d’autres gènes peuvent modifier l’activité du Locus S. Il est à noter que les taches blanches extrêmes (sw) peuvent être associées à des problèmes développementaux tels que la surdité ou les souffles cardiaques, comme chez les boxers blancs. Nous n’avons pas fini d’entendre parler de la génétique des taches blanches. Pour les âmes intrépides qui souhaitent une discussion plus approfondie sur la génétique des taches blanches, je vous réfère à des ressources plus complètes :
https://en.wikipedia.org/wiki/Coat_(dog)
http://www.doggenetics.co.uk/white.htm
4. Gènes pour les patrons/motifs de couleurs
Locus A (Agouti)
Le gène Agouti a une double fonction : il agit comme gène maître dans la formation de la pigmentation jaune et il est impliqué dans la formation des patrons de couleurs. Ce patron peut comprendre une alternance de bandes (poils avec des bases pâles et des extrémités foncées) comme chez les Bergers allemands et les loups ou une alternance de noir et de roux provenant de la pigmentation jaune.
Locus M (Merle)
Merle est un patron de couleur irrégulier et frappant qui est observé chez un grand nombre de races de chiens. Le patron Merle donne des zones de poils délavées et tachetées au travers d’un pelage de couleur uniforme. Ce qu’il faut savoir à propos du Merle, c’est que le gène agit durant le développement de l’animal (un peu comme le Locus S), que c’est un trait dominant (seulement une copie du gène doit être mutée pour donner le patron de Merle) et qu’il peut être associé à des malformations congénitales (incluant des problèmes d’oreilles et de yeux). Règle à respecter : il ne faut jamais accoupler ensemble deux animaux Merle, car un animal double Merle (les deux copies du gène étant mutées), a plus de chance d’avoir des maladies congénitales.
Charte de couleur pour la génétique de la coloration canine
Pour une représentation visuelle de la génétique des couleurs couverte dans cet article, voir le tableau des couleurs fourni par Labgenvet : Génétique du chien 2,1 : Charte de couleur.
Plus sur la génétique des couleurs de chien
Encore une fois, cette présentation de la génétique de la coloration chez les chiens est une initiation au terrain. Plusieurs points intéressants ont été exclus, incluant les taches de couleurs sur un pelage blanc, le grisonnement progressif, la génétique des poils courts, longs et frisés, entre autres. Ces omissions sont intentionnelles et permettent d’éviter le problème de « perdre la forêt de vue à cause de tous les maudits arbres ! ».